Précisions sur le projet d’implantation d’une antenne relais 5G sur le territoire communal de Muhlbach sur Bruche

1 – Rappel de ce qui relève de la compétence du maire et du conseil municipal au sujet de l’implantation
d’antennes de téléphonie (synthèse issue d’une publication de Me Pierre-Alain MOGENIER – Avocat au
barreau de Lyon) :

L’installation des antennes relais pour le réseau 5G fait l’objet d’un vif débat à la veille du déploiement de cette nouvelle technologie. Des citoyens ainsi que des personnalités politiques se mobilisent actuellement pour demander un moratoire sur l’installation de ces antennes- relais. Compte-tenu du poids financier lié à l’attribution des licences 5G aux opérateurs, l’Etat ne semble pas enclin à faire valoir le principe de précaution.

I. Le Maire est-il compétent pour s’opposer à l’implantation d’une antenne relais 5G ?

La réponse est ambivalente.
En effet, il ressort des dispositions du code des postes et des communications électroniques que le schéma d’implantation des antennes relais relève de la compétence d’autorités centrales. Ce point a été clarifié, aussi, par la jurisprudence administrative.
En effet, la police spéciale des communications électroniques ressort uniquement de la compétence de l’Etat. Ainsi, le Conseil d’Etat a précisé dans une décision n°326492 du 26 octobre 2011 « Commune de Saint-Denis » que :

« Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le législateur a organisé une police spéciale des communications électroniques confiée à l’Etat ; » (…)
« le législateur a confié aux seules autorités qu’il a désignées, c’est-à-dire au ministre chargé des communications électroniques, à l’ARCEP et à l’ANFR, le soin de déterminer, de manière complète, les modalités d’implantation des stations radioélectriques sur l’ensemble du territoire ainsi que les mesures de protection du public contre les effets des ondes qu’elles émettent »

Le schéma d’implantation des antennes relais ne relève donc pas de la compétence du maire mais bien d’une autorité centrale sous la responsabilité de l’Etat, en l’espèce l’Agence nationale des fréquences.
Compte-tenu de ce qui précède, un maire n’est donc pas fondé à s’opposer à une demande d’implantation en excipant du principe de précaution (même décision) :

qu’il résulte de ces dispositions que le principe de précaution, s’il est applicable à toute autorité publique dans ses domaines d’attributions, ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet de permettre à une autorité publique d’excéder son champ de compétence et d’intervenir en dehors de ses domaines d’attributions ; que, par conséquent, la circonstance que les valeurs limites d’exposition du public aux champs électromagnétiques fixées au niveau national ne prendraient pas suffisamment en compte les exigences posées par le principe de précaution n’habilite pas davantage les maires à adopter une réglementation locale portant sur l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile et destinée à protéger le public contre les effets des ondes émises par ces antennes ;

Cette opposition à déclaration préalable ne peut s’opérer qu’en raison d’élément scientifiques faisant apparaître des risques (CE, 30 janvier 2012, Société Orange, n°344992) :

« au regard seulement de risques incertains, sans rechercher si des éléments circonstanciés étaient de nature, en l’état des connaissances scientifiques et des pièces versées au dossier, à justifier qu’il soit fait opposition à la déclaration préalable déposée en application de la législation sur l’urbanisme en vue de l’installation de l’antenne en cause, le tribunal administratif a commis une erreur de droit »

Néanmoins, au titre des dispositions de l’article L.45-9 du code des postes et des communications électroniques, les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public peuvent autoriser les exploitants à occuper le domaine public.

Un maire est donc compétent pour conclure avec un exploitant de réseau une convention d’occupation du domaine public pour l’implantation d’une antenne relais (CAA Nantes, 8 octobre 2018, n°17NT01212).
Dans certaines conditions, les opérateurs devront déposer en mairie une demande d’autorisation d’urbanisme. Celle-ci sera donc instruite par le Maire qui pourra trouver des artifices juridiques afin de s’opposer à cette demande d’autorisation (II).

II. Concrètement, quelle est la marge de manœuvre des maires et comment peuvent- ils s’opposer à l’implantation d’antennes relais ?

La loi n°2015-136 du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétique, dont les dispositions sont désormais codifiées dans le code des postes et des communications électroniques (ci-après « CPCE »)a eu pour objet d’élargir les possibilités de débat sur l’installation de ces équipements ainsi que d’inclure dans le processus décisionnel les communes, leur exécutif ainsi que les citoyens.

Mais la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique a considérablement simplifié les contraintes d’implantation des antennes relais, qui étaient à la charge des opérateurs. Principalement, l’instruction des demandes faites par les opérateurs a été grandement simplifiée et les délais de réponse pour les maires sont passés de deux mois à un mois.

Toutefois, il existe deux biais permettant aux Maires de s’opposer à l’implantation d’antennes relais sur leur territoire :

  • les dispositions contenues dans les documents d’urbanisme (i) ;
  • l’instruction de la déclaration préalable (ii) ;
i. Les dispositions contenues dans les documents d’urbanisme

On le sait, les communes sont couvertes par des documents d’urbanisme (principalement un PLU communal ou intercommunal), qui peuvent imposer un certain nombre de contraintes pour l’implantation de ces équipements.

Il s’agit, à ce stade, de mettre en œuvre des mécanismes contraignants afin d’entraver la faculté d’implantation des antennes relais. En d’autres termes, il faut dissuader l’agence nationale des fréquences d’identifier la commune comme un lieu permettant l’implantation d’une antenne relais.

Néanmoins, ces contraintes doivent être juridiquement fondées, à peine des les voir contestées et annulées par le juge administratif.

Il apparaît nécessaire, au regard des dispositions de l’article L.151-4 du code de l’urbanisme de justifier le refus ou les contraintes d’implantation sur la commune de ces antennes relais. Cette justification se retrouvera donc dans le rapport de présentation, qui fait partie intégrante du PLU.

De même, les règles d’urbanisme fournissent un certain nombre de solutions pour empêcher l’implantation de ces équipements. Une commune pourra donc émettre certaines contraintes d’implantation en raison de règles relatives :

  • aux monuments historiques ;
  • à l’existence d’un site remarquable ;
  • à l’existence de sites classés ou inscrits
  • aux réserves naturelles
  • à la protection de la navigation aérienne.

Eu égard à la multiplicité des règles édictables sur les fondements précités, il apparaît possible d’empêcher ou à tout le moins de contraindre fortement les opérateurs d’installer des antennes relais sur le territoire d’une commune.

ii. L’instruction des autorisations d’urbanisme

L’implantation des antennes relais doit respecter le droit des autorisations d’urbanisme. Il n’est donc pas possible pour un opérateur d’implanter une antenne relais sans déposer, au moins, une déclaration préalable (article R.421-17 du code de l’urbanisme) ou à permis de construire (article R.421-14 du code de l’urbanisme).

Selon le type d’antennes installées ainsi que son lieu d’implantation (sur les toits ou au sol), l’opérateur devra déposer soit un permis de construire soit une déclaration préalable. Il sera alors possible pour la commune de s’opposer à la demande d’autorisation d’implantation en veillant à bien se fonder sur les dispositions des documents d’urbanisme applicables.

En conclusion, il apparaît possible pour les maires de s’opposer à l’implantation, sur leur commune, d’antennes relais. Néanmoins, la réussite d’une telle opération nécessite un examen approfondi des documents d’urbanisme afin de contrôler l’existence de règles pouvant faire opposition à une telle implantation.

En tout état de cause, les refus d’autorisation d’urbanisme ou les décisions d’opposition devront être juridiquement fondées et réfléchies afin d’empêcher toute annulation ultérieure par les juridictions administratives.

2 – Le cas spécifique de Muhlbach :

En 2022 la commune est informée par l’opérateur d’infrastructures TDF (télédifusion de France) d’une étude qui va être menée, dans le cadre du plan national de déploiement de la technologie dite « 5G », sur les possibilités d’implantation de relais dans le secteur.
Au printemps 2023 TDF nous fait part des résultats de l’étude et nous informe que plusieurs zones répondent aux exigences techniques d’implantation et qu’un opérateur (free) leur a passé commande. Une antenne relais sera donc implantée localement. TDF précise que prioritairement ils cherchent à contractualiser avec les communes pour une implantation sur terrain communal. Si un accord ne peut être trouvé ou que la commune de dispose pas de terrains disponibles, ils recherchent du côté des propriétaires privés. En derniers recours ils ont un accord-cadre avec la CEA (Collectivité Européenne d’Alsace) qui est propriétaire d’une grande partie des terrains qui bordent la RD1420.

L’examen des propriétés communales fait apparaître 3 possibilités :

  1. Secteur de la salle des fêtes
  2. En contrebas de l’église
  3. Sur le talus séparant la RD1420 et la piste cyclable, le long de la route des romains en direction d’Urmatt.

Bien que se trouvant à la limite de la zone « acceptable » par TDF, c’est la troisième possibilité qui est retenue car c’est celle qui est la plus éloignée du village et impacte le moins visuellement.

Une demande d’occupation du domaine public est déposée par TDF pour l’implantation et il est proposé au conseil municipal de se positionner lors de la séance 30 mai 2023 Après présentation et débats, la proposition est rejetée en l’état faute de détails suffisants 2 voix pour, 8 voix contre et 3 abstentions. TDF en est informé.
Une nouvelle demande est alors déposée avec un dossier de présentation plus complet. Cette nouvelle demande est examinée lors de la séance du 31 août 2023 et fait à nouveau l’objet de discussions. Il est rappelé lors de ces discussions que la décision qui doit être validée ne porte pas sur la possibilité ou non d’implanter cette antenne relais (qui ne relève pas de la compétence du conseil municipal comme indiqué dans le rappel en première partie du document) mais bien de décider si cette implantation peut être faite sur un terrain communal et donc permettre à la commune d’avoir le choix du lieux et, face à cette nuisance qui est imposée, de bénéficier de la petite redevance d’occupation du domaine public associée à cette implantation. Le conseil valide la proposition avec 7 voix pour, 4 voix contre et 2 abstentions. Un dépôt de dossier d’urbanisme (déclaration préalable) devra être réalisé et instruit au vu des règles du PLU.
La délibération est validée par le contrôle de légalité de la préfecture le 5 septembre 2023.
Le dossier de déclaration préalable est déposé par TDF le 6 novembre 2023 et est instruit par l’ATIP (Agence Territoriale d’Ingénierie Publique) comme toutes les demandes d’urbanisme qui concernent la commune.
Le projet n’étant pas situé dans une zone d’exclusion (site classé, réserve naturelle, …) et respectant les règles d’urbanisme décrite dans le PLU selon l’instruction de l’ATIP, l’autorisation est accordée le 9 janvier 2024.

3 – En conclusion :

La couverture mobile du territoire national relève d’une décision de l’état (New deal mobile 2018) et laisse peu de latitude au Maire.

Le choix qui a été arbitré par la commune portait sur l’acceptation ou non que le projet d’antenne soit implanté sur un terrain appartenant à la commune plutôt que sur un terrain privé ou appartenant à une autre collectivité territoriale (CEA) —> La réponse a été oui

La vérification de la conformité du projet aux règles du PLU ayant été apportée par le service instructeur (ATIP), l’autorisation de construire a été signée par le maire le 9 janvier 2024.

Un groupe de villageois en ayant fait la demande, a été reçu en mairie le 07/02/2024. Il leur a été apporté l’ensemble des éléments précisés ci-dessus.

Le classement « commune nature » dont dispose le village traduit la volonté de la commune de ne plus utiliser de produits phytosanitaires et de limiter au maximum son impact environnemental pour l’ensemble des actions dont elle à la maitrise. A aucun moment ce classement ne prend des éléments sur lesquels la commune n’a pas de prise directe.

Catégories : Vie pratique

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